Faces

C’est avec un plaisir non dissimulé que j’accrocherai puis ouvrirai prochainement « Faces », une première exposition personnelle à la galerie de Manon Bara, artiste née à Angers en 1985 et bruxelloise d’adoption depuis son passage sur les bancs de la Cambre.
Le titre de l’exposition est d’abord évidemment à entendre dans la langue de Shakespeare et désigne le parti pris choisi pour aborder cette première percée sur la planète Bara que l’on traversera au milieu d’un champs d’autoportraits et portraits autant humains qu’animaliers, principalement inédits. Une véritable galerie de portraits où la caractéristique serait que tous sont « humains trop humains », même, pas si « bêtes ». Nous laisserons de côté pour l’instant, sculpture-objets peints, gravures, paysages, natures mortes ou presque, puisque nous ferons une exception en en montrant au moins une, une face de citron oserai-je dire, tant l’agrume est singulièrement présent. Hans Theys, un fidèle de la première heure, nous a fait le plaisir d’y revenir très précisément dans un texte à découvrir dans le catalogue accompagnant et prolongeant l’exposition.
Au rayon des anglicismes, il faut encore songer au verbe « to face » signifiant, regarder, affronter, faire face. Effectivement, les sujets de Bara nous regardent. Leur regard nous fait face parfois même jusqu’à l’affrontement. Malgré une frontalité certaine, à y regarder de plus près, la somme présente nombre de facettes : le monolithe Bara n’en est pas un, plutôt à regarder comme une sorte de diamant à mille facettes, mais non univoques. Il faut en revenir d’abord à ses yeux, à tous ses regards, tendres, vides, profonds, éternels, féroces, malicieux. C’est aussi dans le traitement des chaires, des pelages, des plumages, des écailles,.. de toute surface,
que cette grande richesse d’émotions tangibles et palpables dans sa réalité matérielle. La peinture est utilisée comme un fluide vital.
Curieusement, en même temps, point de réalité et qu’importe, Manon va peindre tout de la même façon. Ne compte plus, semblerait-il, que le rappel de l’urgence de la situation. Pour nous en convaincre, l’œuvre compte nombre de bambins et de vieillards. Voilà le mystère de la vie flanqué sur la toile par ses extrémités dans ses sujets et dans ses objets et on vacille, non on jubile, certainement les deux.
La conscience ou l’insouciance, rire ou pleurer, pourquoi choisir ?
Dans une perspective classique par ses thèmes, Manon Bara, ange et démon, adosse la fugacité de la vie à la vie éternelle sur un ton glamrock préchaos annoncé au XXIe siècle. D’ici là, il s’agit là d’une belle promesse rassénérante et visionnaire pour qui aime, l’art, la vie, et les légumes aussi.